Le partenariat, la posture de l’avenir? AGEFI Indices, janvier 2019

Le mot partenariat fait partie du langage courant. Au point d’être utilisé pour des réalités qui n’ont le plus souvent rien à voir avec la posture associée. Notion dépassée, ou à réinventer ?

L’article démontre que le partenariat est clairement la posture la plus favorable pour réussir ensemble, notamment dans les organisations matricielles. Les fonctions transverses (évolution des fonctions support) sont appelées à jouer un rôle décisif dans la création de valeur.

Article AGEFI – Janvier 2019 – Daniel Held

Le partenariat : la posture de l’avenir ?

Le mot partenariat fait partie du langage courant. Au point d’être utilisé pour des réalités qui n’ont le plus souvent rien à voir avec la posture associée. Notion dépassée, ou à réinventer ?

Être partenaire, c’est vouloir réussir ensemble quelque chose dans la vie. Le couple est la forme la plus courante du partenariat depuis la nuit des temps, avec un projet commun qui consistait surtout dans la reproduction de l’espèce, et qui a pris aujourd’hui des formes diverses et variées. Dans le monde du business, la recherche de partenaires consiste à associer certains acteurs à la réussite d’un projet. Dans les organisations, les dernières décennies ont vu l’émergence de business partners un peu partout, dans les fonctions support ou transverses, où il s’agit d’associer les compétences RH, IS, Finance, Achats, Marketing, … pour réussir des objectifs business de plus en plus complexes et stratégiques.

En théorie, le partenariat est donc entré dans les mœurs et est devenu une notion courante, voire banale. Mais la réalité est bien différente, avec une posture trop rarement habitée de manière appropriée. Il en résulte une perte significative de puissance et d’impact.

Tout d’abord, de quoi parlons-nous ? Le partenariat n’est ni l’excellence opérationnelle ni la prestation de services. L’excellence opérationnelle est la condition sine qua non pour aspirer à monter en puissance et à faire évoluer la nature de la relation. Par exemple, ni IS, ni Finance, ni RH, ni les achats, ni le marketing ne pourront être partenaires du business si les systèmes et communications ne fonctionnent pas, les factures et les salaires ne sont pas payés, … La prestation de service est la capacité à remplir les mandats et missions confiés : réaliser des projets informatiques, recruter un collaborateur, acheter une prestation bien spécifique, … Celle-ci réclame un sens du client, des compétences et prestations de haut niveau, de l’innovation. La qualité et le professionnalisme des prestations constituent donc le 2ème niveau à franchir avant de prétendre au partenariat.

Le partenariat prend une place différente dans la création de valeur, qui se révèle de plus en plus décisive dans un monde global et complexe. Il ne s’agit en effet plus seulement de répondre à des attentes, mais de contribuer, avec professionnalisme, sens stratégique, esprit d’innovation et leadership, à la réussite de la vision et des objectifs communs. Le partenariat permet de conjuguer les compétences et le leadership des uns et des autres pour réussir des choses qui sont inaccessibles à chacun tout seul. Le partenariat n’existe que lorsqu’on obtient du « Win – Win – Win » : Chacune des parties et l’organisation doivent y gagner : en résultats, en compétence, en impact, en bien-être. Tout ce qui est fait en partenariat se révèle plus puissant pour l’organisation que tout ce qui pourrait se faire seul, quel que soit le génie de la personne.

Lorsque IS, RH, Finance, Marketing, … sont de vrais partenaires, cela signifie que le business devient plus performant, des résultats inaccessibles deviennent réalité, de nouveaux modèles d’affaires et de travail émergent. Chacun, dans le partenariat, fait sa part du travail, amène ses compétences, prend ses responsabilités mais aussi démontre du leadership en temps opportun, en lien toujours avec la vision commune définie, claire, forte et stimulante (ce que nous voulons réussir ensemble). Et en lien avec cette vision, certaines activités sont réalisées ensemble ou en co-construction, dans le terrain de jeu défini.

En termes de posture, le partenariat implique de la confiance et du respect mutuels, ainsi qu’un dialogue (écoute et feedback) de qualité qui permet de renforcer et de pérenniser la relation. Nous ne sommes donc ni dans les passages obligés, si fréquents aujourd’hui (p.ex. : « pour obtenir une prestation de ma part, tu dois remplir le formulaire associé ») ni dans la « soumission » associée à la prestation de service (« je fais tout pour que tu sois satisfait des prestations »). Ces postures sont de l’ordre de la domination-dépendance, bien loin de la « balance » associée au partenariat.

Après plus de 20 ans que nous avons passé à la promouvoir, force est de constater que la posture de partenaire n’est pas une posture naturelle, parce qu’elle implique un ajustement permanent à l’autre, avec de l’affirmation de soi et l’occasion donnée à l’autre de s’affirmer également. Elle mérite donc d’être particulièrement travaillée, exercée. Tout ce qui nous empêche d’être bien avec nous-même, donc d’être bien avec l’autre, sont des obstacles rédhibitoires pour le partenariat. Autant dire qu’ils sont nombreux, associés à nos expériences de vie et aux schémas comportementaux développés pour réussir.

Sans partenariat, le succès est difficile dans un monde connecté, dans un contexte où plus personne n’a les ressources pour disposer de toutes les compétences nécessaires, où la matrice dans les organisations devient la référence. Travailler la posture du partenaire se révèle donc une clé de succès pour être performant dans la durée, pour réussir la transformation digitale, pour intégrer la diversité des générations, des métiers et des personnalités.

Dernier point important : le partenariat ne se décrète pas. Il se construit, au travers du projet commun, des interactions, de la confiance et du respect mutuel construit dans la durée, et des succès obtenus. En d’autres termes, le terme Business partner sur sa carte de visite n’a à lui seul aucun impact. L’effort à mener concerne en priorité la posture, donc le sujet qui sort le plus les individus concernés de leur zone de confort[1].

Le partenariat est mort. Vive le partenariat. Et place à la posture !

[1]Voir : Le responsable RH, Partenaire stratégique, Formation à l’UNIFR ; 8-9.4.2019 ; Réussir le partenariat stratégique : place à la posture, D. Held, Publication HR Today, nov. 2013 ; Formation spécifiques PIMAN en partenariat avec Equites. Plus d’infos sous : www.piman.ch


[1] C’est en ces termes que Jean-Paul II présentait le choix du Chrétien (« Entrez dans l’espérance »).
[2] John Kotter, Leading Change, Harvard Business Review, Jan. 2007
[3] Sortir du confort, les leçons de la grenouille, AGEFI Indices Janvier 2018, cf. www.piman.ch – Changement.
[4] L’exemple du réchauffement climatique en est l’illustration parfaite : la catastrophe est en marche, mais ne suffit pas à faire prendre des mesures drastiques pour sauver l’humanité.
[5] D. Held, S’affirmer pour mieux réussir ensemble, AGEFI Juin 2017 – cf. www.piman.ch – Leadership

Daniel Held • janv. 01, 2019
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